Cet après-midi, j'ai passé mon baptême de
call center. Cinq heures dans une grande salle pleine de petits cubes. La mission : recueillir les dons pour les équipes de la Croix-Rouge en Haïti. Après un petit cafouillage de départ qui nous fit attendre deux heures que nos lignes soient ouvertes, les appels se sont enchaînés, enchaînés, enchaînés... Et bien sûr, obstacle majeur, puisque j'étais en mission francophone, les accents... Le mien, le leur.
"Téléthon Ensemble pour Haïti, bonsoir..."
- Ah oui bonjour, j'voudrais donner pour Haïti. Cin' dollars s'il vous plaît.
- Cent dollars, oui monsieur.
- Nan !!! J'ai dit cin' dollars pas cent !
- Oh excusez-moi ! Cin
que dollars donc. Vous souhaitez payer par carte Visa ou Mastercard?
- En espèces !
- Je suis vraiment désolée, mais je ne peux accepter des paiements que par carte de cré..
- Oh c'est pas possible, hein !
Bip bip bip...
A peine le temps d'avaler ma salive entre deux appels ("vas y, gloups, c'est le moment"), certains ont la voix qui tremblent, d'autres me parlent de leurs petits-enfants qui ne peuvent pas se rendre compte. Deux vieilles soeurs qui vivent ensemble, "attendez mademoiselle, attendez... Je vous passe ma soeur, d'accord...". Beaucoup de personnes âgées qui ont du mal à m'entendre : j'appuie le demi-casque contre mon oreille, je rapproche le micro, je lève la voix. Tous autour de moi dans la salle font de même. C'est un brouhaha impossible, tout le monde se met à crier pour surmonter la voix du voisin, anglophone ou francophone. Beaucoup de questions : comment paraîner un enfant, dans combien de temps les fonds arriveront-ils, les compagnies de carte de crédit prélèvent-elles leurs parts, qui sommes-nous exactement?
Le Québec est touché au plus profond. A la fin, j'ai honte de me sentir si épuisée. Que les dons continuent...
Le lien pour la
Croix Rouge...