mardi 17 février 2009

Parfois, rien ne va. Et parfois, il suffit de peu de chose apparemment pour que tout se transforme magiquement, imperceptiblement...
Dimanche, pleine de rage et d'énervement, je me suis imposé une marche vigoureuse de presque 20 kilomètres pour vider mon esprit fatigué par bien trop de questions d'avenir. J'ai longé la plage, les pieds devenus insensibles, les genoux douloureux. Revenue sur Denman Street, rêvant d'un grand café chez Delanys, j'ai trouvé la place envahie par tous ceux qui, comme moi, étaient sortis profiter du soleil. Maudite. Tous mes endroits favoris étaient pris d'assaut. Jambes flageolantes, ne rêvant que d'une chaise, je suis revenue en centre-ville où j'ai miraculeusement réussi à dénicher un gros fauteuil chez Starbucks. Et j'ai bien failli m'y endormir, sous le regard un peu inquiet de mon voisin de canapé.
Lundi, réveillée brutalement à 4 heures : et si mon nouveau visa ne me permettait pas d'étudier ici... Journée passée à courir d'un bureau à l'autre, pour prendre tous les renseignements possibles. Finalement rassurée. Me sentant aussi un peu bête. Plans d'avenir, projets, questions. Je me vide la tête en regardant Iron Chef of America. L'équivalent cuisine de Gladiators, ce vieux show des années 90, souvenir bizarre de mes années écossaises. Trois équipes de cuisiniers ont une heure pour préparer cinq plats autour d'un même aliment imposé. Hier : olive verte. Passionnant. L'arbitre tient à la fois du ninja et du mafieux japonais. Il fait des saltos entre fours et plans de travail. Hurle de manière dramatique à la présentation de chaque plat.
Mais le lundi soir, avant tout, c'est salsa. Heure de bonheur sans partage. Après deux semaines d'interruption forcée, je retrouve tout naturellement le rythme, l'enchaînement des pas, la joie de tourbillonner. Une heure et tout est transformé. Oubliée la fatigue, disparues les angoisses, les pensées qui n'en finissent pas de tourner ! Je ne suis plus qu'une boule d'énergie qui voudrait continuer encore et encore. Légèreté.
Dans le SkyTrain au retour, j'ai la musique dans les oreilles et mon livre sur les genoux. Je triture machinalement le ticket de métro parisien qui me sert de marque-page lorsque mon voisin de banquette me tapote l'épaule : « Tu es Parisienne ? » C'est Mamédy. Derrière est assis Rudy. Ils habitent New Westminster, à une station de la mienne. Sont là depuis plus de deux ans. Ont des avis partagés sur la France, l'avenir au Canada. L'un voudrait rentrer, l'autre pas. Le racisme en France. Le déracinement. Quitter son pays, lorsque ses parents sont déjà passés par-là. L'échec ou l'avenir ? Nous parlons tout le trajet durant.

Je suis en train de relire Les Confessions de Rousseau. Par esprit de contradiction, certainement. J'aime assez l'absurdité de la chose. Jamais à Paris cela ne me serait venu à l'idée. Je désespère d'être un jour en accord avec le lieu où je me trouve... mais finalement, c'est ce décalage perpétuel qui fait ma drogue. C'est là seulement que je me reconnais, autant l'admettre maintenant. Et en goûter le pétillant.

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