lundi 23 février 2009

Cordoba Iguazu Iguazu Cordoba... Depuis deux jours, je pèse l'un, je pèse l'autre.
Et finalement, je crois que les églises et les missiones jesuiticas sont en train de l'emporter sur le spectacle des chutes - et les 18 heures de bus nécessaires pour y aller. Pas que je sois particulièrement enthousiasmée par les Jésuites, mais je n'ai jamais su résister à l'attrait mystérieux d'une église. Vide. Va pour Cordoba.

dimanche 22 février 2009

Coupure. J'ai déménagé toutes mes affaires. Mon idéal de légèreté en a pris un coup. Comment peut-on accumuler autant en trois mois ? La réponse n'est pas si compliquée : les livres, encore et toujours. Provisions faites à Paris, de belles pépites trouvées ici, une pile indécente de bouquins de cours, un gros manuel de business – ceux-là, impossible de les éviter. Habits d'été aussi ramenés de France – j'ai oublié les chaussures. Elles feront peut-être le voyage par la poste. Une paire de bottes pour la neige. Un gros manteau contre la pluie d'ici. Je me rassure en me disant qu'après tout, je ne suis pas en voyage. Et la liste de tous les livres empruntés à la bibliothèque prend la forme d'un gros fantôme dont j'ai réussi à me débarrasser ! Toujours ça de moins dans les sacs.
Les jours s'étirent tranquillement, d'un livre à l'autre. Je goûte le silence. Me suis remise à la cuisine. Pas de musique, ni d'Internet. Coupure technologique qui me libère l'esprit. Et me donne de bonnes excuses pour trainer encore dans les cafés... Je prends des notes sans fin ni ordre : j'absorbe le concentré d'humanité qui y passe, je regarde les gens du coin de l'œil, fais semblant de lire alors que j'écoute sans vergogne les conversations, observe les gestes, tout ce que les mots ne disent pas. Bits and pieces.

jeudi 19 février 2009

Des envies de croquer le monde... A la bibliothèque, je me suis précipitée sur les guides de voyage pour l'Argentine et me suis prise à rêver paresseusement à ce qui m'attend : Buenos Aires, une excursion certainement à Cordoba ou Iguazu, je ne sais pas encore... J'ai suffisamment oublié les douleurs du trajet jusqu'à Berlin cet automne pour envisager en toute sérénité de reprendre le bus... Trois semaines ailleurs, ma première rencontre avec l'Amérique Latine. M'immerger dans l'espagnol pour en retrouver les rythmes et les sonorités oubliées depuis tant d'années. J'ai envie d'histoires, de mythes et de légendes, j'ai envie de me démultiplier encore et encore. Je voudrais pouvoir envelopper le monde – curiosité éternelle, aller voir plus loin... Et à mon retour en avril, il faudra reprendre les cours, chercher un appartement, trouver du travail. M'installer dans ma nouvelle vie, en somme, et relever tous les défis. En attendant, je monte mes projets petit à petit, je dévore les livres, en français, anglais ou espagnol ; je marche, j'arpente la ville, je la creuse. Je fais des rencontres. Je commence à réaliser que je suis ici pour un long moment et prends le temps d'absorber ce nouvel état de fait. Étrange, jusqu'à présent, l'idée n'avait pas encore pris sa forme concrète. C'est maintenant chose faite et j'en ressens un soulagement et un bienêtre immenses. Ce sont tous mes rêves qui se matérialisent peu à peu.

mardi 17 février 2009

Parfois, rien ne va. Et parfois, il suffit de peu de chose apparemment pour que tout se transforme magiquement, imperceptiblement...
Dimanche, pleine de rage et d'énervement, je me suis imposé une marche vigoureuse de presque 20 kilomètres pour vider mon esprit fatigué par bien trop de questions d'avenir. J'ai longé la plage, les pieds devenus insensibles, les genoux douloureux. Revenue sur Denman Street, rêvant d'un grand café chez Delanys, j'ai trouvé la place envahie par tous ceux qui, comme moi, étaient sortis profiter du soleil. Maudite. Tous mes endroits favoris étaient pris d'assaut. Jambes flageolantes, ne rêvant que d'une chaise, je suis revenue en centre-ville où j'ai miraculeusement réussi à dénicher un gros fauteuil chez Starbucks. Et j'ai bien failli m'y endormir, sous le regard un peu inquiet de mon voisin de canapé.
Lundi, réveillée brutalement à 4 heures : et si mon nouveau visa ne me permettait pas d'étudier ici... Journée passée à courir d'un bureau à l'autre, pour prendre tous les renseignements possibles. Finalement rassurée. Me sentant aussi un peu bête. Plans d'avenir, projets, questions. Je me vide la tête en regardant Iron Chef of America. L'équivalent cuisine de Gladiators, ce vieux show des années 90, souvenir bizarre de mes années écossaises. Trois équipes de cuisiniers ont une heure pour préparer cinq plats autour d'un même aliment imposé. Hier : olive verte. Passionnant. L'arbitre tient à la fois du ninja et du mafieux japonais. Il fait des saltos entre fours et plans de travail. Hurle de manière dramatique à la présentation de chaque plat.
Mais le lundi soir, avant tout, c'est salsa. Heure de bonheur sans partage. Après deux semaines d'interruption forcée, je retrouve tout naturellement le rythme, l'enchaînement des pas, la joie de tourbillonner. Une heure et tout est transformé. Oubliée la fatigue, disparues les angoisses, les pensées qui n'en finissent pas de tourner ! Je ne suis plus qu'une boule d'énergie qui voudrait continuer encore et encore. Légèreté.
Dans le SkyTrain au retour, j'ai la musique dans les oreilles et mon livre sur les genoux. Je triture machinalement le ticket de métro parisien qui me sert de marque-page lorsque mon voisin de banquette me tapote l'épaule : « Tu es Parisienne ? » C'est Mamédy. Derrière est assis Rudy. Ils habitent New Westminster, à une station de la mienne. Sont là depuis plus de deux ans. Ont des avis partagés sur la France, l'avenir au Canada. L'un voudrait rentrer, l'autre pas. Le racisme en France. Le déracinement. Quitter son pays, lorsque ses parents sont déjà passés par-là. L'échec ou l'avenir ? Nous parlons tout le trajet durant.

Je suis en train de relire Les Confessions de Rousseau. Par esprit de contradiction, certainement. J'aime assez l'absurdité de la chose. Jamais à Paris cela ne me serait venu à l'idée. Je désespère d'être un jour en accord avec le lieu où je me trouve... mais finalement, c'est ce décalage perpétuel qui fait ma drogue. C'est là seulement que je me reconnais, autant l'admettre maintenant. Et en goûter le pétillant.

samedi 14 février 2009

Hier soir, partie pour lire Jung à la bibliothèque, j'ai trouvé portes fermées à 18 heures. Alors, j'ai erré en ville, y trouvant une effervescence étrange et inexpliquée. J'ai poussé la porte d'un bar qui semblait contenir tout Vancouver. J'ai levé les yeux vers les écrans télé et compris la raison de tout ce bouillonnement : les Canucks de Vancouver jouaient contre les Stars de Dallas. Hockey sur glace, évidemment. Encore endormie par les méfaits du décalage horaire, je me suis assise dans un coin sombre, j'ai pris un verre et je me suis laissé porter par les hurlements des fans qui regardaient perdre leur équipe. Vraiment impitoyable, ce sport. Les coups pleuvent, je n'y comprends rien. Ces grosses baraques foncent à deux ou trois dans les vitres de protection pour attaquer le minuscule palet que je n'arrive même pas à voir. Coups de crosse les uns sur les autres, l'arbitre rajuste son casque de protection avant de se glisser au milieu de la mêlée, hurlant et poussant chacun d'un côté. Les tribunes sont en folie. Le bar aussi. Ambiance enfumée sans cigarettes. C'est ainsi que je me le représente. Le temps se dilate. Les Canucks entrent en disgrâce.